Une
Sprint ST délurée
La
Triumph Sprint RS, dérivée de la Sprint ST,
saffirme visuellement: plus sportive, plus agressive
et un temps soit peu plus délurée, le look de
la moto a gagné en caractère. Le moteur est
identique, mais les partie-cycles sont distinctes, voila ce
qui différencie les deux versions. Carénage
de tête de fourche plus court, bras oscillant classique
(au lieu du monobras de la ST), instrumentation plus sommaire
et hop! Conséquences directes... 8 kg et 34.000 frs
de moins; déjà deux bonnes nouvelles. Le moteur
trois cylindres, qui reçoit une nouvelle couleur grisée,
et est à présent à lair libre,
mais reste enchâssé dans un classique cadre périmétrique
peint en noir. On ne peut que le regretter, car cette teinte
tend malheureusement à adoucir la ligne, le gris de
la ST lui allait si bien. La Sprint RS adopte une toute nouvelle
instrumentation mixte (la même que sur la TT 600): analogique
pour le compte-tours et digitale pour le compteur, les kilométriques
total et partiels ainsi que la température moteur.
A noter que la jauge à essence de la ST disparaît.
Au niveau des autres différences ST/RS, les clignotants
avants ne sont plus intégrés au carénage
mais proviennent de la Daytona. Le garde-boue avant ainsi
que les rétroviseurs sont inédits. Bien sûr,
on pourra reprocher à la RS labsence de béquille
centrale et de poignées de maintien passager et les
maigres solutions darrimage des bagages sur la selle
arrière, dotée dailleurs dun sympathique
dosseret tendance très sport, mais ce serait faire
fit de linitiative de Triumph, qui emboîte le
pas de BMW en matière doptions et daccessoires
et propose une moto que lon équipe à la
carte. Certains achèteront la béquille centrale
où la poignée de maintien passager, dautres
privilégieront lesthétique en équipant
leur RS du sabot moteur. Une façon de ne rien imposer,
de tout proposer et dajouter encore un peu plus de polyvalence
à cette machine. Ces options comprennent: une béquille
centrale, une prise électrique, des poignées
chauffantes, une selle chauffante, un garde boue arrière
en carbone, des protections carbones diverses, un porte-bagages,
un top-case, un sabot moteur, un raton laveur, des poignées
passagers, une alarme, un silencieux spécifique, une
sacoche réservoir ainsi que des sacoches cavalières.
Une
RSV 1000 adoucie
Mais
comment rendre plus conviviale cette RSV. Simple: vous prenez
un cadre et un bras oscillant en alu un peu moins complexes
et moins chers que les originaux, vous y greffez un moteur
moins puissant, mais mieux rempli, que vous mettez en valeur
grâce à un carénage plus discret. Soignez
la position de conduite et la protection à laide
dune bulle haute et tirez les prix pour affronter la
concurrence: cest prêt! A la place de votre réplica
se tient une sport-GT. Dessinée au bistouri, lAprilia
SL 1000 revendique une forte identité esthétique.
Ses traits alternent lignes acérées et formes
galbées. Le demi-carénage laisse éclater
au grand jour son superbe cadre dédoublé. Le
style est moderne, élancé et laisse présager
un tempérament de feu. RSV et SL 1000 partagent la
même base moteur. Ce dernier conserve son système
PCC (Pneumatic Clutch Control) qui empêche le dribble
lorsque l'on rempile rapidement les vitesses. La programmation
de linjection a été revue afin de privilégier
le couple et la rondeur. Le taux de compression passe aussi
de 11,4 à 10,8 et le volumineux échappement
deux-en-un laisse la place à une double sortie plus
esthétique. Afin de garder toute sa pêche au
V2 lors des accélérations (il perd 10cv pour
en développer 118), la démultiplication finale
a été raccourcie. Si les dimensions externes
restent quasi identiques, la position de conduite a été
modifiée: les reposes pieds sont moins hauts, les guidons
sont plus relevés et la selle a été abaissée
dun cm (mais elle reste haute). Enfin une bulle plus
haute devrait améliorer sensiblement la protection.
Le passager bénéficie de poignées de
maintien. La fourche ne change pas, mais lamortisseur
arrière, un Sachs, nest plus réglable
en compression (il perd aussi 5 mm de débattement).
Exit également lamortisseur de direction. Afin
daméliorer la maniabilité, le pneu arrière
passe de 190 mm à 180 mm. Le tableau de bord, digne
dun avion de chasse, est emprunté à sa
frangine et offre au regard une multitude dinformations:
led de régime programmable, chrono, horloge de bord,
température moteur, témoin de béquille
latérale; tout y est... sauf une jauge. Au final, on
na pas du tout limpression dhériter
dune version "cheap" de la sportive vedette dAprilia,
bien au contraire.
Maniabilité
perfectible
Pour
mettre en valeur la polyvalence et les qualités respectives
de nos deux machines, quoi de mieux quun itinéraire
varié; de la ville en entrée, un peu dautoroute
avant den découdre sur les merveilleuses routes
que nous réserve le réseau secondaire. La Triumph
Sprint RS offre une grande facilité de prise en main,
presque déroutante. A peine monté sur la moto
et on est comme chez soi. La position de conduite est naturelle:
appui presque nul sur les poignets, selle moelleuse et basse,
impec! Les commandes, aux standards japonais, sont précises
et douces. Seul le levier dembrayage est perfectible:
non réglable, il est trop écarté de la
poignée pour le rendre agréable à lusage.
Première. Ce moteur est déjà un délice:
dès les plus bas régimes il vous tracte sur
un filet de gaz. Ensuite il vous donne limpression dêtre
en prise directe avec la poignée de gaz. La moindre
rotation se traduit par une poussée franche et une
sonorité grondante. Magique! Le couple et la disponibilité
du trois cylindres font des merveilles. Dans les embouteillages,
la maniabilité est bonne, mais le rayon de braquage
nous le confirme: sil est en progrès, il reste
dans labsolu juste passable.
LAprilia
SL 1000 est moins à laise en ville. La hauteur
de selle élevée et la position typée
sport (repose pieds situés plus haut et poignets plus
en appui) dénotent. Cest quand même moins
radical quavec la RSV 1000, dont elle est dérivée,
mais le confort de selle sommaire et la commande dembrayage
ferme rappellent que son terrain de jeu est ailleurs. Heureusement,
les suspensions souples en début de course sont confortables
à allure réduite. Le rayon de braquage est acceptable
et le V2 reprend sans rechigner à partir de 2.500 tr/mn,
plutôt bien pour un bicylindre. On est cependant loin
de lonctuosité de la RS. Prenons notre mal en
patience et attendons que lhorizon se dégage.
Le temps de sénerver contre des rétros
trop petits et nous voila déjà à lentrée
de lautoroute.
Stabilité
rassurante
A
haute vitesse, la bulle de la SL 1000 assure au pilote une
absence de turbulences sur le casque. Malheureusement, la
relative étroitesse du plexi laisse les épaules
en dehors de sa protection et limite de ce fait son efficacité
globale. Sur long trajet, la fermeté de lamortissement,
tout comme celui de la selle, auront tôt fait de vous
convaincre à une pause salvatrice et méritée.
La
Triumph Sprint RS joue à nouveau placée. A son
guidon, le moelleux de la selle et le confort de suspensions
incitent à avaler des kilomètres. Seule lefficacité
de la bulle mettra un frein à votre boulimie. Même
constat que pour lAprilia: trop étroite, les
épaules restent en dehors de sa protection. Nos deux
belles sont renvoyées dos à dos. Mais si lautoroute
met en avant les qualités protectrices des machines,
elle permet également de mettre laccent sur leur
stabilité en grandes courbes. Nos deux motos assurent
sur ce chapitre. Leur comportement, imperturbable, atteste
de la rigidité de leur châssis. Pas de louvoiements
parasites ni de ruades intempestives, rien que du très
rassurant.
Hargneux
ou onctueux
Sorti
de lautoroute, dès que le parcours se fait sinueux,
lAprilia retrouve son terrain de chasse favori et trace
sa route à un rythme endiablé. Faisant preuve
dune vivacité peu commune pour sa cylindrée,
la SL 1000 se la joue sportive. Il est vrai que la fougue
du V twin à 60° aide grandement les choses. A
ses commandes, le pilote cherche avant tout a profiter des
envolées magiques du moteur. Un peu creuse en bas,
mais transcendée au passage des 6.500 tr/mn, hargneuse,
rageuse, la mécanique de litalienne est très
vive et franche dans ses montées en régime.
Elle met à mal la pauvre diode qui indique le changement
de rapport à lapproche de la zone rouge; à
trop jouer dans les tours, celle-ci clignote sans arrêt.
Et question musicalité, notre twin nest pas en
reste. Le pilote profite pleinement du grondement rauque produit
par ladmission à chaque ouverture des gaz et
qui est encore amplifiée par la résonance du
réservoir. Un bonheur pour les amateurs, un vrai spectacle
son et lumière. Pour sarrêter, lAprilia
peut compter sur un freinage puissant et parfaitement dosable,
secondé brillamment par un frein moteur efficace. Ni
dribble, ni blocage intempestif ne sont à craindre
grâce au découplage partiel de lembrayage
lors des phases brutales de rétrogradage. Le châssis
rigide, associé à des suspensions tarées
dures, mais limitant très bien les transferts de masse
parasites, offrent à la SL 1000 une tenue de route
de haut niveau. Mais nhésitez pas à contre-braquer,
sortir une fesse au freinage et ouvrir la jambe à lentrée
du virage et alors il sera bien difficile de rivaliser en
termes de vivacité avec la belle italienne bien excitée.
Bref, vous lavez compris, lAprilia SL 1000 se
pilote. Mais on est loin dune conduite instinctive telle
quon peut la concevoir avec la Triumph Sprint RS!
Langlaise
profite de son coffre, offrant plus defficacité
que le V-twin en bas. Plus doux, le trois cylindres est le
plus prompt à la reprise. Cest dailleurs
dans le bas du compte-tours que la RS arrache vraiment. Dès
2.000 tr/mn, le moteur procure à la Triumph un élan
monstrueux qui ne se brise qua lapproche de la
zone rouge. A ce couple phénoménal, sajoute
une sonorité profonde et une présence mécanique
fascinante. Cest vraiment un monde à part à
essayer une fois dans sa vie de motard. Lagilité
de la Sprint RS est diabolique, elle reste totalement neutre
en cumulant facilité et efficacité; en plein
dans la définition dune routière sportive,
capable de vous promener comme de vous offrir de laction.
A tel point quelle rappelle le comportement de certaines
600 sport, avec quelques kilos en plus bien entendu. Quant
aux nouveaux Bridgestone BT 020 qui équipent notre
machine, franchise et grip à la réaccélération
étant au rendez-vous, on se sent totalement en confiance.
Malheureusement, si lagilité du châssis
et la sûreté du train avant sont bluffants, on
ne peut pas en dire autant de lamortisseur arrière.
Le confort est toujours perfectible sur les bosses, où
il a tendance a vous transmettre quelques coups de raquettes.
Le freinage est idéal, puissant et progressif avec
un bon feeling à la poignée. Certains pourraient
lui reprocher son mordant un peu excessif, mais sachez quil
offre de quoi faire des freinages danthologie.
Conclusion
Plutôt
accueillante comparée à sa génitrice
la RSV 1000, où à dautres twins sportifs,
la SL lest forcément moins face à une
routière avertie. Vraiment enthousiasmante, sur les
routes viroleuses à souhait, elle ravit son pilote
par des sensations de conduite impressionnantes. La fermeté
des suspensions rappelle cependant sur quel type dengin
vous êtes installé.
Aussi
à laise en ville que sur route défoncée,
la Triumph Sprint RS met en avant son extrême polyvalence
associée à une très grande facilité
dutilisation. Maniable et naturelle, elle se repose
sur son moteur exaltant pour charmer son pilote: les reprises
sont tout simplement surprenantes et ce dès les plus
bas régimes. Un véritable turbo-diésel
hyper vitaminé!
Au
final, deux machines très attachantes, mais situées
chacunes aux antipodes du segment des routières sportives.
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